épisode 23 du podcast
Peut-on réellement s’aimer ?
C’est la question que je me suis posée récemment, et c’est aussi la question que je vous pose aujourd’hui. Peut-on réellement s’aimer ?
Mais après tout, qu’est-ce que l’amour ? Avons-nous tous expérimenté un jour l’amour ? Et sommes-nous tous légitimes pour le définir justement ? Il existe une différence entre amour, amour de soi, amour propre, et par extension, narcissisme.
L’amour, c’est un sentiment bienveillant et positif d’affection, d’attirance, envers soi comme envers autrui.
Le narcissisme, c’est entretenir un amour démesuré pour son image, et par extension, pour l’image visuelle que l’on renvoie au monde.
L’amour propre, c’est avoir de l’estime pour qui l’on est et pour qui l’on incarne : c’est entretenir un sentiment d’amour fort pour soi, autant pour son enveloppe physique que pour tout ce qu’elle enveloppe.
L’amour de soi, se rapproche finalement de l’amour propre, sauf que lui, ne s’attache qu’à l’être, et met de côté le paraitre. Il s’agit de s’aimer en tant qu’individu digne d’estime. Il implique de ne pas se restreindre à une définition superficielle de soi se résumant à notre enveloppe physique.
Mais alors, s’aimer soi-même, impliquerait finalement de ne pas considérer qui nous sommes physiquement ?
Pour moi, l’amour de soi a une connotation bien plus grande et profonde, bien plus spirituelle et vraie, que tous les autres termes que je pourrais vous énumérer ici. Mais pour s’aimer entièrement et complètement, cela implique aussi, d’aimer son corps. Cela implique de faire la paix, avec son corps. Je n’ai jamais véritablement abordé ce sujet publiquement, tout simplement parce que j’estimais de pas avoir la légitimité de le faire. Avec du recul et de l’honnêteté, je me rends compte que je manquais en fait purement et simplement, de confiance en moi. Car amour de soi & confiance en soi, sont deux notions intimement liées. D’aussi loin que je puisse me rappeler, mon corps est devenue ma bataille à partir de mes 16 ans; l’âge à laquelle j’ai commencé à faire une fixette sur chaque partie de mon corps. Comme si chaque fragment qui me constituait était une pièce défectueuse qu’il fallait changer ou réparer. Rien, il n’y avait à l’époque rien, que je chérissais de mon corps.
Comment parvenir à s’aimer, si nous ne sommes pas capable ne serait-ce que de nous regarder dans un miroir ? Avant mes 16 ans, mon physique n’avait jamais été une préoccupation. La vie était simple, tellement simple, qu’elle me réussissait. J’avais une corpulence entre guillemet dite normale, des amis, un petit ami. Une vie saine, stable, équilibrée. Je ne sais pas si je m’aimais véritablement, mais une chose est sure, je ne me posais pas ce genre de question – et c’est peut-être ici, que réside la réponse. Je ne me posais pas ce genre de question, donc j’avais confiance en moi, donc j’entreprenais ce que je désirais, Et, tout, ou presque, me réussissait. Dès lors que j’ai commencé à porter une attention particulière sur mon corps, les choses ont changé. Dès lors que le regard que je portai sur mon corps changea, celui des autres changea également. Mais je me rappelle pourtant qu’à l’époque, l’opinion des autres ne m’importait finalement pas.
Ce qui m’importait réellement, c’était l’opinion que j’avais de moi-même. Et je crois que c’est ce qu’il y a de plus dur à gérer : soi. Trouver la limite entre perfectionnisme et acceptation. Trouver le juste milieu entre haine et narcissisme. Accepter le gris, pour laisser le noir et le blanc au banc des remplaçants.
Car oui, la perfection du corps, c’est ce qui nous pousse à nous livrer cette bataille infernale. Sauf que la perfection, c’est probablement le terme le plus subjectif qu’il puisse exister. Si je vous demande aujourd’hui : qu’est-ce qu’un corps de femme parfaite ? Nous aurions potentiellement la même définition : celle que la société en a faite. Mais si je vous demandais à vous, vous qui m’écoutez : qu’est-ce qu’un corps parfait, pour VOUS ? Il y a 15 ans, je vous aurais répondu qu’un corps parfait, c’est un corps proportionné, musclé mais pas trop, tonique mais pas trop, mince mais pas trop, élancé mais pas trop, Aujourd’hui je vous répondrais qu’un corps parfait, c’est un corps en pleine santé. C’est un corps qui est qui il est censé être, dans toute sa singularité.
L’amour de soi débute, dès lors que l’on est capable d’accepter et d’embrasser notre singularité. Nous sommes, sans exception, uniques. Sur cette vérité, comment voulez-vous que nous rentrions tous dans le même moule ? Sur cette évidence, comment est-il alors possible d’être heureux, si l’objectif que nous poursuivons inlassablement, n’est tout simplement pas atteignable ? Car ce qui nous rend heureux et épanoui, c’est la sensation d’accomplir et d’avancer. Alors, peut-être que c’est tout simplement l’objectif que nous devons changer. Peut-être que c’est tout simplement la perspective, l’angle de vue, qu’il nous faut modifier. Peut-être que c’est vraisemblablement le regard que nous portons sur nous-même, que nous devons transformer.
Notre corps, c’est notre maison : chaque battement de coeur qui nous rend un peu plus vivante chaque jour, se produit dans ce corps. Sans notre corps, nous ne serions simplement pas de ce monde. Notre existence sur cette terre ne serait pas. Fermez un instant les yeux, et rappelez-vous ces choses de la vie qui vous font le plus de bien : marcher pieds nus dans l’herbe, prendre un proche dans ses bras, regarder le coucher de soleil, tourner les pages d’un livre. Le problème dans toute cette histoire, c’est que notre corps, c’est aussi la première chose que les autres voient de nous; c’est leur clef d’entrée pour nous définir, nous caractériser. Nous juger.
Et c’est dans cette dualité, que la bataille commence. Entre les standards bien trop restrictifs et durs que la société nous imposent. Et la nécessité de faire avec ce que la nature nous a donné. Mais moi, je crois que s’accommoder de qui l’on est, ce n’est pas suffisant. La première fois que j’ai mis les pieds dans un studio de yoga, ma confiance en moi était au point -200. Je n’avais aucun amour pour qui j’étais, pour qui j’incarnais, pour le corps qui me permettait d’avancer dans la vie. Et c’est bien là mon plus grand regret. Celui de ne pas avoir vu qui j’étais, au delà de mon apparence. Celui d’avoir inconsciemment éteint cette lumière, qui rayonnait pourtant si fort ces dernières années. Celui de m’avoir maltraité, piétiné. Abîmé.
Mes premiers mois sur un tapis ont été conflictuels. J’avais honte de mon corps et le montrer fut l’un des plus grand challenges auquel j’ai du faire face dans ma vie. Mais j’étais convaincue que ma transformation devrait nécessairement être précédée d’une phase d’inconfort. Que je ne pourrais trouver le bonheur, qu’en acceptant cet inconfort, cette incertitude. Mais peut-être, que la force et le courage, se construisent sur ce chemin. Aujourd’hui, je regarde mon corps dans le miroir, et peu m’importent les changements, peu m’importent les transformations, car tout arrive pour une raison. Mon corps me parle, je l’écoute. Mon corps n’est plus un combat. Nous sommes en paix, lui et moi.
Parce que sans mon corps, je ne serais pas là.
Sans mon coeur, je ne pourrais pas aimer.
Sans ma bouche, je ne pourrais pas rire.
Sans mon nez, je ne pourrais pas respirer.
Sans mon corps, je ne pourrais pas voyager, je ne pourrais pas bouger, je ne pourrais pas danser.
Mon corps m’offre aujourd’hui le plus précieux des cadeaux : celui de pouvoir exister.
Et de pouvoir ressentir : la peine comme la joie, la douleur comme la guérison.
L’art du mouvement par le yoga m’a permis de me réconcilier avec mon corps. Et à fortiori, avec mon être tout entier. Parce que, avec le temps, la lassitude du combat s’est installé. J’ai finalement accepté de rentre les armes, non sans mal. Plus je lâchai prise, plus je devins moi. Plus je devins moi, plus j’appris à m’aimer et à aimer qui j’étais.
Parfois, je dis à mes proches « j’aimerais me voir par les yeux avec lesquels tu me vois ». Ce serait tellement plus facile, n’est-ce pas ? Car notre beauté, que vous le croyez ou non, se définit essentiellement par la lumière qui réside en nous. C’est la manière avec laquelle vous allez rentrer dans une pièce, et l’irradier toute entière. Lâcher prise, c’est comme se jeter dans le vie : on y va tête baissée, et c’est effrayant parce qu’on ne sait absolument pas vers quoi l’on se dirige. S’il y a bien une chose en laquelle je crois, c’est le pouvoir de l’intuition. L’intuition, elle se travaille, elle se développe. Le yoga m’a aidé à développer mon instinct, et à me reconnecter à mon corps par le mouvement et la respiration. La respiration, c’est notre souffle de vie.
Aujourd’hui, j’aime à penser que j’entretiens une relation intime et unique avec mon corps. A chaque fois que je dois prendre une décision, cette petite voix continue de résonner juste derrière mon oreille – celle qui me dit que je ne suis pas jolie, que je ne suis pas forte, que je suis incapable et inutile. Mais désormais, ma lumière brille bien plus fort que ne s’exprime cette petite voix. Cette lumière, c’est celle de l’acceptation et de l’amour de soi. Cette lumière, c’est celle de la paix intérieure.
Alors, à chaque moment de votre vie où vous sentirez un conflit s’installer dans votre tête, fermez les yeux et visualisez cette lumière qui réside dans votre poitrine, dans votre ventre.
Déroulez votre tapis de yoga, fermez les yeux, et placez vos mains sur votre poitrine.
Bougez avec intention, celle de protéger et de respecter votre corps.
Inspirez,
Expirez.
Namasté.